Un groupe d’étudiants pose pour une photo
Association informatique (UWC)

Le « Responsible Computing Challenge » de Mozilla encourage la participation des étudiants dans le cadre historique du développement de l’intelligence artificielle en Afrique du Sud.

Alors que l’Afrique du Sud fait des progrès en matière de gouvernance de l’IA, une association étudiante saisit cette opportunité pour établir une stratégie plus équitable en la matière.

En partenariat avec le Responsible Computing Challenge (RCC) de Mozilla, l’association informatique des étudiants de l’Université du Cap-Occidental (UWC) a formulé des recommandations au sujet du cadre politique de l’Afrique du Sud en matière d’intelligence artificielle. Une initiative soutenue par l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID).

La politique d’IA proposée par le ministère sud-africain des communications et des technologies numériques (DCDT, Department of Communications and Digital Technologies) vise à promouvoir un développement responsable de l’IA, en mettant l’accent sur le déploiement éthique, l’équité et l’atténuation des préjugés. Cette politique est en phase avec la philosophie de Mozilla et la mission du RCC, qui consiste à inscrire la notion d’éthique dans l’informatique en formant la prochaine génération de développeurs d’IA.

La participation des étudiants aux processus d’élaboration des politiques est essentielle à la diversification des acteurs qui définissent l’avenir de l’IA. La section sud-africaine du RCC encourage et facilite la participation des étudiants aux dialogues politiques, en invitant récemment les associations étudiantes à faire part de leurs commentaires sur la politique nationale en matière d’intelligence artificielle.

En prenant part à l’élaboration de la politique, les étudiants ont été encouragés à dialoguer avec leurs pairs, à analyser le document de manière critique et à fournir un retour d’information pertinent. Arehone Matodzi et Ntanganedzeni Phidzaglima, les étudiants responsables de l’association informatique, ont décrit cette expérience comme étant stimulante et ont donné un exemple du rôle important que jouent les étudiants dans la mise en place d’un dialogue politique constructif entre eux, avec la communauté et avec un réseau plus large de parties prenantes. Matodzi a reconnu que « la plupart des étudiants ignoraient l’existence d’un cadre de travail et se sont réjouis de l’occasion qui leur était donnée de contribuer au processus ».

Pallier les lacunes de compétences dans le domaine de l’IA

Dans le cadre de leur participation à l’élaboration de la politique relative à l’IA, les étudiants ont fait part de leurs interrogations quant à la capacité des mesures proposées à combler les lacunes de compétences dans le pays. Ils ont notamment souligné que le cadre ne définissait pas clairement la manière dont le gouvernement envisageait de rendre les compétences liées à l’IA plus accessibles. Ils ont noté que les formations en IA dans les universités sud-africaines ne sont pas assez complètes et peinent à suivre le rythme des innovations mondiales dans le domaine.

Pour que l’adoption de l’IA soit réellement efficace, il est nécessaire de disposer d’un plan clair et applicable qui démontre l’impact de l’IA sur les industries et la vie des Sud-Africains, « Il ne s’agit pas simplement de la posséder (la technologie d’IA), mais elle doit pouvoir générer un impact », a fait remarquer M. Matodzi. Les étudiants ont insisté sur la nécessité d’une politique qui ne se limite pas à promouvoir le développement de l’IA, mais qui garantisse également que les citoyens soient exposés, formés et préparés à l’avenir numérique.

Connaissance de l’IA et mobilisation du public

Les étudiants ont également soulevé un autre problème, à savoir que le cadre ne tient pas suffisamment compte des connaissances du public en matière d’IA. Alors que la politique aborde le développement de l’IA et l’atténuation des risques, elle n’accorde que peu d’attention à la manière dont les citoyens ordinaires seront formés pour interagir avec les technologies d’IA, essentiellement du point de vue du consommateur ou de l’utilisateur. Les étudiants se sont posé la question de savoir si le niveau de connaissances de la population et la qualité de l’enseignement seraient suffisants pour atteindre les compétences exigées au niveau local et mondial.

Les étudiants ont également insisté sur l’importance de favoriser un écosystème d’IA inclusif où les citoyens (en particulier ceux issus de communautés marginalisées) ne sont pas laissés pour compte. La collaboration entre le gouvernement, le monde universitaire et le secteur privé est essentielle, et les organisations étudiantes, en particulier, ont un rôle vital à jouer dans la mise en œuvre d’initiatives de formation à l’IA.

La place du militantisme étudiant dans l’élaboration de politiques en matière d’IA

L’histoire de l’activisme étudiant en Afrique du Sud est particulièrement riche et profondément liée à la lutte plus large du pays pour la justice sociale, notamment pendant l’apartheid. Aujourd’hui, les étudiants de l’UWC pensent que leur militantisme peut englober le domaine du développement technologique. Ils se considèrent comme des acteurs importants dans la construction d’un avenir axé sur l’IA qui soit non seulement fondé sur l’innovation, mais aussi sur l’inclusion et l’accessibilité pour tous.

En collaborant avec des organisations telles que Mozilla dans le cadre de campagnes de sensibilisation à l’IA et de programmes d’information publique, nous pouvons nous attaquer à certains problèmes jugés cruciaux, notamment la formation à l’IA. Matodzi remarque : « En tant qu’organisation étudiante, nous sommes enthousiastes à l’idée de nous engager... Les étudiants peuvent être très efficaces dans la mobilisation, le militantisme et la participation aux campagnes... il existe un vaste réseau parmi les étudiants, les communautés et d’autres organisations étudiantes, autant de ressources que nous pouvons utiliser ». Certaines de ces initiatives locales impliquent souvent de fournir une formation de base sur les outils d’IA, de favoriser le développement de compétences plus larges et de collaborer avec d’autres organisations étudiantes pour augmenter la portée de leurs actions de militantisme et de construction de mouvements.

Effectivement, le gouvernement doit donner la priorité à la collaboration et à la mobilisation des différentes parties prenantes, y compris les organisations étudiantes, en veillant à ce que leurs voix soient entendues et que leurs contributions soient valorisées dans les dialogues politiques. Gretchen Adams, coordinatrice de la jeunesse pour le RCCSA, fait remarquer que « Dans une société dont l’histoire est profondément marquée par les inégalités et les disparités sociales et économiques qui perdurent encore aujourd’hui, il est essentiel que l’approche sud-africaine de l’élaboration de la politique technologique soit inclusive et équitable. L’inclusion seule ne suffit pas à assurer l’équité, car tout le monde peut être inclus dans les discussions sur les politiques clés. Toutefois, ce sont généralement les plus puissants et les plus influents qui occupent le devant de la scène, laissant les plus marginalisés et les plus démunis sans voix. C’est particulièrement le cas pour les jeunes, dont les opinions se perdent facilement parmi les différents groupes concernés. Il est donc important de donner la parole aux personnes sous-représentées mais les plus touchées dans les débats publics, dans l’élaboration des politiques et dans la planification des interventions ».

Un plaidoyer en faveur d’une IA inclusive

Le cadre politique offre une opportunité majeure pour favoriser un écosystème de l’IA dynamique, à la fois innovant et inclusif. Toutefois, pour que cette vision devienne réalité, il faut mettre clairement l’accent sur le développement des compétences, la sensibilisation du public et une collaboration significative entre tous les niveaux de la société.

La stratégie du RCC en Afrique du Sud joue donc un rôle clé grâce à son approche centrée sur la jeunesse, visant à faciliter les opportunités et les plateformes pour accroître la participation et l’intérêt des jeunes. Le RCC Afrique du Sud s’est également engagé à travailler avec les étudiants dans le cadre du renforcement des capacités de représentation, et à mener des campagnes politiques et de sensibilisation à la technologie orchestrées par des étudiants.

Les étudiants de l’UWC ont démontré l’importance d’impliquer les jeunes dans les conversations politiques. Alors qu’ils continuent de plaider pour une stratégie d’IA plus équitable, leurs contributions soulignent la nécessité pour la politique sud-africaine en matière d’IA de ne pas se limiter à l’innovation et d’aborder les aspects pratiques liés à l’éducation, à l’accès et à l’équité.

Nous espérons que le ministère des communications et des technologies numériques tiendra compte des observations des étudiants.